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Курс французского языка 4 том Г. Може; (стр. 79 из 81)

«Oui, Monique, il y a une femme dans ma vie» . (Tout était bleu au-
dessus de notre tête et sous nos pieds; on apercevait à travers le détroit la
côte africaine. Il me serrait contre lui. «Si tu me trompais, je me tuerais.

— Si tu me trompais, je n'aurais pas besoin de me tuer. Je mourrais de
chagrin». Il y a quinze ans. Déjà? Qu'est-ce que quinze ans? Deux et deux
font quatre. Je t'aime, je n'aime que toi. La vérité est indestructible, le
temps n'y change rien.)

«Qui est-ce?

— Noëllie Guérard.

— Noëllie! Pourquoi?»

Il a haussé les épaules. Évidemment. Je connaissais la réponse: jolie,
brillante, aguicheuse. Le type de l'aventure sans conséquence et qui flatte
une homme. Avait-il besoin d'être flatté?

Il m'a souri:

«Je suis content que tu m'aies interrogé. Je détestais te mentir.

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— Depuis quand me mens-tu?»
Il a à peine hésité:

«Je t'ai menti à Mougins. Et depuis mon retour». Ça faisait cinq

semaines. Pensait-il à elle à Mougins?

«Tu as couché avec elle quand tu es resté seul à Paris?

— Oui.

— Tu la vois souvent?

— Oh! non! Tu sais bien que je travaille...»

J'ai demandé des précisions. Deux soirées et un après-midi depuis son
retour, je trouve que c'est souvent.

«Pourquoi ne m'as-tu pas prévenue tout de suite?» Il m'a regardée
timidement et il m'a dit, avec du regret dans la voix: «Tu disais que tu
mourrais de chagrin...

— On dit ça.

J'ai eu envie de pleurer soudain: je n'en mourrais pas, c'était ça le plus
triste. A travers des vapeurs bleues nous regardions l'Afrique, au loin, et les
mots que nous prononcions n'étaient que des mots. Je me suis rejetée en
arrière. Le coup m'avait assommée. La stupeur me vidait la tête. Il me
fallait un délai pour comprendre ce qui m'arrivait.
«Dormons», ai-je dit.

La colère m'a réveillée de bonne heure. Comme il avait l'air innocent,
les cheveux embroussaillés au-dessus du front rajeuni par le sommeil! (Au
mois d'août, pendant mon absence, elle s'est réveillée à côté de lui: je
n'arrive pas à y croire! Pourquoi ai-je accompagné Colette à la montagne?
Elle n'y tenait même pas tellement, c'est moi qui ai insisté. Pendant cinq
semaines, il m'a menti! Ce soir nous avons fait un sérieux pas en avant). Et
il revenait de chez Noëllie. J'ai eu envie de le secouer, de l'insulter, de
crier. Je me suis dominée. J'ai laissé un mot sur mon oreiller: «A ce soir»,
certaine que mon absence l'atteindrait plus qu'aucun reproche; à l'absence,
on ne peut rien répondre. J'ai marché au hasard dans les rues, obsédée par
ces mots: «Il m'a menti». Des images me traversaient: le regard, le sourire
de Maurice posés sur Noëllie. Je les chassais. Il ne la regarde pas comme il
me regarde. Je ne voulais pas souffrir, je ne souffrais pas, mais la rancune
me suffoquait: «II m'a menti!» Je disais: «Je mourrais de chagrin»; oui,
mais il me le faisait dire. Il avait mis plus d'ardeur que moi à conclure notre
pacte: pas de compromis, pas de licence. Nous roulions sur la petite route
de Saint-Bertrand-de-Comminges et il me pressait: «Je te suffirai
toujours?» Il s'est emporté parce que je ne répondais pas avec assez de feu
(mais quelle réconciliation dans la chambre de la vieille auberge avec

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l'odeur des chèvrefeuilles qui entrait par la fenêtre! IL y a vingt ans: c'était
hier). Il m'a suffi, je n'ai vécu que pour lui. Et lui, pour un caprice, il a trahi
nos serments! Je me disais: « J'exigerai qu'il rompe, tout de suite...» J'ai été
chez Colette; toute la journée, je me suis occupée d'elle, mais intérieu-
rement je bouillonnais. Je suis revenue à la maison, épuisée. «Je vais exiger
qu'il rompe». Mais que signifie le mot «exigence» après toute une vie
d'amour et d'entente? Je n'ai jamais rien demandé pour moi que je ne
veuille aussi pour lui.

Il m'a prise dans ses bras d'un air un peu égaré. Il avait téléphoné
plusieurs fois chez Colette et personne n'avait répondu (pour qu'elle ne soit
pas dérangée j'avais bloqué la sonnerie). Il était fou d'inquiétude.

«Tu n'imaginais tout de même pas que j'allais me descendre?

— J'ai tout imaginé».

Son anxiété m'a été au cœur et je l'ai écouté sans hostilité. Bien sûr, il a
eu tort de rne mentir, mais il faut que je comprenne; la première hésitation
fait boule de neige: on n'ose plus avouer, parce qu'il faut avouer aussi qu'on
a menti. L'obstacle est encore plus infranchissable pour des gens qui
comme nous mettent si haut la sincérité. (Je le reconnais: avec quel
acharnement j'aurais menti pour dissimuler un mensonge.) Je n'ai jamais
fait sa part au mensonge. Les premiers mensonges de Lucienne et de
Colette i m'ont scié bras et jambes. J'ai eu du mal à admettre que tous les
enfants mentent à leur mère. Pas à moi ! Je ne suis pas une mère à qui on
ment; pas une femme à qui on ment. Orgueil imbécile. Toutes les femmes
se pensent différentes; toutes pensent que certaines choses ne peuvent pas
leur arriver, et elles se trompent toutes.

Simone de Beauvoir, La femme rompue

PLUS JAMAIS

Louise de Vilmorin (1902-1969), avant d'être, dans les dernières années de sa vie,
l'amie d'André Malraux, fut un délicat poète («L'Alphabet des aveux») et une
romancière contant avec gtâce des intrigues sentimentales ('--Sainte une fois
Madame de...»). Elle évoque ici avec mélancolie le renoncement à l'amour.

Plus jamais de chambre pour nous,
Ni de baisers à perdre haleine
Et plus jamais de rendez-vous
Ni de saison, d'une heure à peine,
Où reposer à tes genoux.


Pourquoi le temps des souvenirs
Doit-il me causer tant de peine
Et pourquoi le temps du plaisir
M'apporte-t-il si lourdes chaînes
Que je ne puis les soutenir?

Rivage, oh! rivage où j'aimais
Aborder le bleu de ton ombre
Rives de novembre et de mai
Où l'amour faisait sa pénombre
Je ne vous verrai plus jamais.

Plus jamais, c'est dit. C'est fini.
Plus de pas unis, plus de nombre,
Plus de toit secret, plus de nid,
Plus de lèvre où fleurit et sombre
L'instant que l'amour a béni.

Quelle est cette nuit dans le jour?
Quel est dans le bruit ce silence?
Mon jour est parti pour toujours,
Ma voix ne charme que l'absence,
Tu ne me diras pas bonjour (...)

Mon temps ne fut qu'une saison.
Adieu saison vite passée.
Ma langueur et ma déraison
Entre mes mains sont bien placées
Comme l'amour en sa maison.

Adieu plaisirs de ces matins
Où l'heure aux heures enlacée
Veillait un feu jamais éteint.
Adieu. Je ne suis pas lassée
De ce que je n 'ai pas atteint.

Louise de Vilmorin,
L'Alphabet des aveux.,

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BONJOUR, L'ÉTÉ

Françoise Sagan a été l'enfant prodige du post-existentialisme. L'enfant
prodigue aussi. Car, si ses romans baignent dans un climat d'«ennui»,
directement hérité de «La Nausée» et de «L'Étranger», elle y a rompu avec la
morale militante et engagée de ses prédécesseurs. Elle a prôné la facilité, le
plaisir, le désengagement en somme et cela au moment où commençait à se
desserrer, en France et en Europe, l'étau de fer qui, depuis la guerre, étouffait
peuples et gens. C'est peut-être cette conjonction qui explique le foudroyant
succès remporté d'emblée par son premier ouvrage, un bref récit de
170 pages.
L'auteur n'avait que dix-neuf ans et racontait une mince histoire de vacances
que certains Jugèrent scandaleuse. Mais c'est le succès remporté par l'œuvre
qui scandalisa le plus.

Mon père avait loué, sur la Méditerranée, une grande villa blanche,
isolée, ravissante, dont nous rêvions depuis les premières chaleurs de juin.
Elle était bâtie sur un promontoire, dominant la mer, cachée de la route par
un bois de pins; un chemin de chèvres descendait à une petite crique dorée,
bordée de rochers roux où se balançait la mer.

Les premiers jours furent éblouissants. Nous passions des heures sur la
plage, écrasés de chaleur, prenant peu à peu une couleur saine et dorée, à
l'exception d'Eisa qui rougissait et pelait dans d'affreuses souffrances. Mon
père exécutait des mouvements de jambes compliqués pour faire
disparaître un début d'estomac incompatible avec ses dispositions de don
Juan. Dès l'aube, j'étais dans l'eau, une eau fraîche et transparente où je
m'enfouissais, où je m'épuisais en des mouvements désordonnés pour me
laver de toutes les ombres, de toutes les poussières de Paris. Je
m'allongeais dans le sable, en prenais une poignée dans ma main, la laissais
s'enfuir de mes doigts en un jet jaunâtre et doux; je me disais qu'il
s'enfuyait comme le temps, que c'était une idée facile et qu'il était agréable
d'avoir des idées faciles. C'était l'été.

Le sixième jour, je vis Cyril pour la première fois. Il longeait la côte sur
un petit bateau à voile et chavira devant notre crique. Je l'aidai à récupérer
ses affaires et, au milieu de nos rires, j'appris qu'il s'appelait Cyril, qu'il
était étudiant en droit et passait ses vacances avec sa mère, dans une villa
voisine. Il avait un visage de Latin, très brun, très ouvert, avec quelque
chose d'équilibré, de protecteur, qui me plut. Pourtant je fuyais ces
étudiants de l'Université, brutaux, préoccupés d'eux-mêmes, de leur

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jeunesse surtout, y trouvant le sujet d'un drame ou un prétexte à leur ennui.
Je n'aimais pas la jeunesse. Je leur préférais de beaucoup les amis de mon
père, des hommes de quarante ans qui me parlaient avec courtoisie et
attendrissement, me témoignaient une douceur de père et d'amant. Mais
Cyril me plut. Il était grand et parfois beau, d'une beauté qui donnait
confiance. Sans partager avec mon père cette aversion pour la laideur qui
nous faisait souvent fréquenter des gens stupides, j'éprouvais en face des
gens dénués de tout charme physique une sorte de gêne, d'absence; leur
résignation à ne pas plaire me semblait une infirmité indécente. Car, que
cherchions-nous, sinon plaire? Je ne sais pas encore aujourd'hui si ce goût
de conquête cache une surabondance de vitalité, un goût d'emprise ou le
besoin furtif, inavoué, d'être rassuré sur soi-même, soutenu.

Quand Cyril me quitta, il m'offrit de m'apprendre la navigation à voile.
Je rentrai dîner, très absorbée par sa pensée et ne participai pas, ou peu,
à la conversation; c'est à peine si je remarquai la nervosité de mon père.
Après dîner, nous nous allongeâmes dans des fauteuils, sur la terrasse,
comme tous les soirs. Le ciel était éclaboussé d'étoiles. Je les regardai,
espérant vaguement qu'elles seraient en avance et commenceraient
à sillonner le ciel de leur chute. Mais nous n'étions qu'au début de juillet,
elles ne bougeaient pas. Dans les graviers de la terrasse, les cigales
chantaient. Elles devaient être des milliers, ivres de chaleur et de lune,
à lancer ainsi ce drôle de cri des nuits entières. On m'avait expliqué qu'elles
ne faisaient que frotter l'un contre l'autre leurs élytres, mais je préférais
croire à ce chant de gorge guttural, instinctif comme celui des chats en leur
saison. Nous étions bien, des petits grains de sable entre ma peau et mon
chemisier me défendaient seuls des tendres assauts du sommeil. C'est alors
que mon père toussota et se redressa sur sa chaise longue:

«J'ai une arrivée à vous annoncer», dit-il. Je fermai les yeux avec
désespoir. Nous étions trop tranquilles, cela ne pouvait durer!

Françoise Sagan, Bonjour tristesse

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BONJOUR TRISTESSE

Le titre de son premier roman, c'est à un poème de
Paul Éluard que Françoise Sagan l'a emprunté. (Elle
en empruntera d'autres: «Dans un mois, dans un an»
à Racine, «Les Merveilleux nuage » à Baudelaire).
«Bonjour tristesse» est tiré de «La Vie immédiate»
(1932), recueil écrit deux années après la séparation
d'avec Gala, la première inspiratrice de l'auteur. D'où
peut-être son titre et la mélancolie qui s'en dégage.

Adieu tristesse

Bonjour tristesse

Tu es inscrite dans les lignes du plafond

Tu es inscrite dans les yeux que j'aime

Tu n 'es pas tout à fait la misère

Car les lèvres les plus pauvres te dénoncent

Par un sourire

Bonjour tristesse

Amour des corps aimables

Puissance de l'amour

Dont l'amabilité surgît

Comme un monstre sans corps

Tête désappointée

Tristesse beau visage

Paul Éluard, La Vie immédiate.

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POUR PRÉPARER UN ŒUF DUR

Eugène Ionesco, après avoir suscité les sarcasmes de la critique parisienne,
est devenu un des auteurs les plus joués et les plus représentatifs de son temps.
Aujourd'hui où il est membre de l'Académie française, on a peine à croire qu'il
a été le champion attitré de l'«anti-théâtre». Pourtant, son œuvre est là, pour
témoigner qu'il a été et qu'il reste un écrivain contestataire. Dans le morceau
qu'on va lire et dont il existe une version pour la scène, il s'amuse à plagier une
recette de cuisine et à montrer que la littérature peut fort bien se nourrir d'anti-
littérature.

Demandez un œuf dur à votre crémier. Dites-lui de le mirer pour en
contrôler la fraîcheur. Le plus souvent ce sera un œuf de poule. On peut
employer aussi l'œuf de cane, qui est plus gros, d'habitude d'une couleur
légèrement verdâtre et qui se trouve moins facilement. Vous rentrez chez
vous en essayant de conserver l'œuf intact. Il est préférable de préparer
l'œuf dur dans la cuisine, sur une cuisinière. Attention! on ne met pas l'œuf
directement sur la cuisinière, mais dans une casserole. Vous mettez de l'eau
au préalable dans la casserole en quantité suffisante pour recouvrir l'œuf.
Par exemple, pour une casserole cylindrique, d'un diamètre de 20 centi-
mètres, d'une hauteur de 15 centimètres, il ne faut qu'un demi-litre d'eau.
Vous pouvez également obtenir l'eau en tournant le robinet placé, dans la
majorité des cas, au-dessus de l'évier; c'est la casserole, contenant l'eau
dans laquelle est plongé l'œuf, que vous posez sur le feu. Si l'eau est froide
vous pouvez la faire chauffer après avoir allumé le feu sur la cuisinière. On
allume à l'aide d'une allumette tirée d'une petite boîte, que vous frottez sur
un des deux côtés, enduits de phosphore rouge. Puis vous tenez l'allumette
au-dessus des orifices du brûleur, après avoir tourné les boutons permettant
au gaz de passer par les tuyaux et d'arriver aux orifices par lesquels il jaillit
sous l'aspect de petites flammes. On peut aussi, à la place de l'allumette,
utiliser soit un briquet, soit un allumoir avec pierre au ferrocérium ou
électrique à frottoir. Vous attendez que l'eau soit en ébullition. Ensuite,
vous y plongez l'œuf.