D’autres linguistes proposent d’autres constructions de la typologie des textes. Donc on ne peut pas estimer ce problème bien étudié. Les linguistes cherchent de nouveaux critères selon lesquels on oppose les textes et on les réunit en types.
- L’étude des unités qui composent le texte élargit les cadres de la théorie syntaxique, en y introduisant comme objet d’étude une nouvelle unité qui est plus grande qu’une proposition. On nomme cette unité ensemble syntaxique composé. Cette branche de syntaxe est l’une des moins étudiées. Elle a été élaborée par A.Pechkovski, L.Boulachovski, N.Pospelov.
- La mise en relief des catégories particulières du texte, des moyens de l’expression est étudiée au cours des dernières années. Cette branche est liée avec tels noms des linguistes comme I.Galperin, P.Charveg. Mais jusqu’à présent il n’y a pas de seule opinion sur les catégories du texte et leur classification.
- L’étude des relations et des liens entre les phrases préoccupe les linguistes. L’examen de la liaison sémantique et structurale entre les éléments du texte contribue à l’élaboration de la syntaxe des structures composées.
3.Limites de l’analyse linguistique du sens
Dans la mésure où les échanges linguistiques oraux comme écrits sont le plus souvent de dimensions supérieures à celles de la phrase, les deux sens d’analyse de textes sont liés. D’autant que les effets de sens fondamentaux, la relation à la réalité extra-linguistique, la modification du sens des éléments du “code” ne se manifestent pas – pour l’essentiel – au niveau de la phrase. Reste que les effets textuels au sens d’effets au niveau des grandes unités tout autant que les effets lexicaux, phoniques, syntaxiques ne sont pas étudiés ici en eux-mêmes, mais dans leur contribution au fonctionnement global du texte, ce qui pose le problème des limites de l’approche linguistique de la signification.
Qu’il s’agisse de l’analyse de l’ensemble des systèmes sémiologiques ou du rôle du langage dans ce qu’on désigne du nom de “la pensée”, il nous semble qu’on a largement tendu dans les développements récents des sciences humaines à oublier que la signification même de sémiotique et de linguistique ne pouvait apparaître que dans leur relation à l’extra-sémiotique et à l’extra-linguistique. Principalement à l’ensemble des pratiques qui éventuellement signifiantes, sont d’abord des pratiques de modification de la nature et ne sont que secondairement signifiantes. On risque, si on oublie cela, de remplacer l’idéalisme de la conscience subjective par l’idéalisme objectif du “tout est signification”.
Plus précisement, le fait qu’une pratique humaine passe par l’utilisation du langage et que le langage soit un mode de communication “universel”, non limité a priori dans son objet, ne signifie pas que le linguiste est au centre de l’analyse de cette pratique. Pour prendre deux exemples opposés:
1) Considérer un texte comme idéologique, c’est non pas en faire une analyse interne en cernant des traits structurels qui distingueraient “le” discours idéolologique du discours scientifique mais renvoyer ce discours à la situation et aux intérêts, aux pratiques effectives des groupes au nom desquels ce discours est tenu.
2) De même, c’est d’abord en tant que chimiste ou mathématicien que l’on peut juger des textes de chimie ou de mathématiques : dans la mesure où c’est leur valeur de vérité qui est le problème essentiel, ce n’est pas ce que le linguiste a à en dire qui est central.
Peut-on alors dire que le linguiste n’a à s’intéresser au discours que dans la mesure où il ne s’occupe pas du problème de la vérité des textes mais seulement des “moyens linguistiques” utilisés?
Le texte embarrasse le linguiste ou du moins l’a longtemps embarrassé au point que celui-ci ignorait le plus souvent celui-là comme en témoigne cette remarque du “Dictionnaire encyclopédique des sciences du langage” de O.Ducrot et V. Todorov: “La linguistique limite à la phrase l’objet de son investigation… Il en est resulte un vide dans la théorie du texte, que des remarques dispersées de la part des littéraires n’ont pas encore comblé”. En plus de vingt ans la situation s’est sensiblement modifiée et l’on peut considérer qu’une branche nouvelle de la linguistique est née, dont l’objet spécifique est le texte et qui reçoit des dénominations diverses telles que grammaire de texte, analyse du discours, pragmatique textuelle, linguistique textuelle, etc.
Au demeurant l’attention à la réalité textuelle est loin d’être un phénomène récent si l’on sort du cadre strict des sciences du langage; elle est même fort ancienne si l’on songe aux pratiques philologiques des humanistes de la Renaissance et plus encore aux analyses formelles des textes littéraires, à la base d’une discipline comme la stylistique – laquelle pour être relativement récente comme discipline académiquement reconnue, puise sinon sa méthodologie du moins une part de sa terminologie dans cette autre pratique de l’Antiquité grecque puis latine: la rhétorique, définissable à la fois comme art de la persuasion et typologie des textes. La linguistique textuelle est donc, on le voit, une discipline quelque peu paradoxale. Evaluée à l’aune de ce qu’il est convenu d’appeler la linguistique moderne, elle paraît toute jeune et en quête de légitimité; replacée dans la longue durée des savoirs et des techniques – philologique, littéraire et judiciaire – qui ont pour objet, sinon le texte en général, du moins certains types de textes, elle semble n’en être que le prolongement ou l’élargissement.
De fait, l’ambition de la linguistique textuelle, comparée notamment à celle de la stylistique – normalement entendue comme stylistique du texte littéraire – est de décrire tout texte: non seulement ceux que la tradition reconnaît comme dotés d’une qualité esthétique, mais tous les autres : textes scientifiques, techniques et juridiques, discours politiques et messages publicitaires, sans oublier la conversation quotidienne.
Loin d’être par conséquent un objet qui se déroberait à l’examen le texte apparaît comme la donnée empirique la plus directement accessible à l’observateur. Encore faut-il pour le décrire en maîtriser la profusion et l’extrême variété. De là procèdent les deux objectifs prioritaires d’une linguistique textuelle: 1) la signification exacte de ce qu’est un texte, de son mode de fonctionnement (c’est là la tâche d’une grammaire de texte en général); 2) l’identification des divers types de texte qui fournit la matière d’une typologie textuelle.
4.Notion de texte dans la linguistique textuelle
On n’a pas encore la seule notion de texte qui serait complète et porterait le caractère terminologique. Donc on va s’arrêter sur celui-ci: « Le texte est une quantité de propositions qui sont liées par différents types de liaison lexicale, logique et grammaticale, capable de rendre une information organisée ».
La linguistique textuelle a pour but de décrire l’organisation des conditions de la communication humaine. Conformément à cela l’objet d’étude de la linguistique textuelle est le texte qui est le produit du langage parlé ou écrit.
On peut citer encore une autre notion de texte, plus étroite, proposée par I.Galperin : «Le texte c’est un produit du langage parlé fixé par écrit». En conformité avec cette notion le texte possède une finalité, littéralement corrigée; il a le titre et toute une série d’unités particulières liées par différents types de la liaison lexicale, logique, grammatique et stylistique. Le texte se caractèrise par l’incarnation graphique et par sa capacité de changer ses qualités. Le texte peut se trouver dans un état de calme ou bien dans un état de mouvement. Son existence n’est bornée de rien.
Le texte reflète l’actualité et donne des renseignements sur cette dernière.
Il existe plusieurs conceptions qui interprètent différemment la notion de texte selon l’aspect principal qu’elles mettent en relief:
1) les conceptions qui mettent en relief un aspect statique : on comprend le texte comme une information dégagée de l’expéditeur,
2) les conceptions qui mettent en relief la processualité du texte : on tient compte de la capacité de la langue de fonctionner en langage.
3) les conceptions qui font l’accent sur la source du texte, c’est-à-dire sur l’activité de la parole. Ces conceptions s’orientent sur l’acte de la communication qui suppose la présence de l’expéditeur et du destinataire.
4) les conceptions stratificationnées qui examinent le texte comme un niveau du système de la langue. L’inclusion du texte dans hiérarchie des niveaux de la langue suppose l’examen d’un texte abstrait et d’un texte dans sa réalisation concrète.
5.Texte littéraire
La même notion « le texte » embrasse de différents objets : « texte » comme produit de la langue naturelle et « texte » comme produit de l’art. On nomme la langue naturelle un système primaire car on découvre le monde à l’aide de la langue et on donne des noms aux différents phénomènes.
Le texte littéraire c’est un système secondaire parce qu’y se croisent le reflet du monde objectif et l’invention de l’auteur. La langue naturelle est un matériel de construction pour le texte littéraire. La langue du texte littéraire possède un système particulier de signes qui reste le même pour différentes langues.
Et dans ce sens on peut dire que « Anna Karenina » et « Madame Bovary » sont écrits en même langue. Cette langue se caractérise par une pluralité d’interprétations. Trois valeurs principales coopèrent dans le texte : la valeur de l’actualité, la valeur des notions et la valeur des significations.
Le texte comme produit de la langue se caractérise par la formule « actualité – sens – texte »; dans le texte littéraire cette formule se transforme en « actualité – image – texte ». Cela reflète telles caractéristiques du texte : union de l’actualité objective et de la fantaisie, de la vérité et de la fiction.
Ces particularités du texte littéraire donnent naissance à la pluralité des plans sémantiques. En parlant de la sémantique de texte il faut mentionner le plan du contenu et le sens du texte.
6. Problème définitoire du texte
Si le texte embarrasse le linguiste, c'est qu'il a quelque mal à en donner une définition. En soi, notons-le bien, cette difficulté n'est pas exceptionnelle : la notion de texte appartient en réalité à cet ensemble de notions préthéoriques que la linguistique a héritées de la tradition grammaticale, rhétorique ou philosophique et qui sont plus intuitivement perçues que conceptuellement délimitées.
En ce qui concerne le texte, la difficulté est accrue du fait suivant. En effet, ce que font clairement apparaître toutes les analyses de type structural (au sens le plus large du mot), c'est que, du phonème au syntagme, toutes les unités subphrastiques sont identifiables par le biais d'une décomposition associant la double procédure de la segmentation et de la commutation et impliquant l'existence de classes distributionnelles de phonèmes, de morphèmes et de syntagmes. Il est corrélativement possible de définir le morphème comme une suite ordonnée de phonèmes, le syntagme comme une suite ordonnée de morphèmes et la phrase comme une suite ordonnée de syntagmes : décrire la grammaire d'une langue, à travers les trois approches (phonologique, morphologique et syntaxique), c'est, notamment, mettre en évidence la nature de ces ordinations.Or, bien que l'analyse distributionnelle ait pu être présentée par certains distributionnalistes comme également applicable au texte, dès lors défini comme suite ordonnée de phrases, on voit mal ce que pourrait être une classe distributionnelle de phrases : il faudrait pour cela pouvoir définir formellement une phrase par la somme de ses environnements possibles, deux phrases étant réputées appartenir à la même classe dès lors qu'elles seraient substituables l'une à l'autre dans un même environnement.
Cela revient à dire qu'on ne saurait décomposer le texte en phrases comme on peut décomposer la phrase en syntagmes, le syntagme en morphèmes et le morphème en phonèmes — ce qui signifie que, dans le cas particulier du texte, le rapport du tout à la partie ne relève pas du même type de prévisibilité que celui qui existe entre chacune des unités subphrastiques et leurs constituants immédiats. Ce saut de nature, qu'on effectue en passant de la phrase au texte, est d'ailleurs explicitement reconnu par la plupart des syntacticiens qui s'accordent, en général, pour affirmer que la phrase constitue l'horizon indépassable de leur champ descriptif.
Une approche distributionnaliste du texte, outre qu'elle expose à une impasse méthodologique tenant au fait qu'on ne saurait identifier les constituants immédiats d'un texte, se heurte à une autre difficulté, inhérente à sa dimension « quantitative » : aussi bien, rien n'interdit de concevoir un texte qui se limiterait à une seule phrase, elle-même d'ailleurs faite d'un seul morphème. Sans aller jusque-là, songeons au poème d'Apollinaire, Chantre, qui tient tout entier, outre son titre, dans l'unique vers :
Et l'unique cordeau des trompettes marines.
Précisément, si l'on s'accorde à reconnaître dans ce vers non pas une phrase isolée mais un texte, c'est que du fait de son association avec le titre et surtout de son début par et, il invite à chercher dans son environnement un contexte qui l'explique et surtout le justifie, si problématique soit-il. Sans doute touchons-nous là à l'essentiel : ce qui fonde l'existence du texte, ce n'est pas sa longueur — elle peut être très variable —, c'est la nature prioritairement contextuelle de son interprétation.
Le texte se trouve de la sorte singulièrement proche de l'énoncé, défini, on s'en souvient, comme la somme d'une phrase et d'une situation (ou contexte) énonciatif. Dans le cas où le texte est d'une certaine longueur, il est en fait somme d'énoncés, lesquels sont formellement identifiables à des phrases ou des séquences phrastiques (paragraphes, chapitres, etc.). Chacune de ces séquencesest tributaire de deux contextes : a) un contexte proprement linguistique, qui réunit une ou plusieurs autres séquences qui la précèdent et/ou la suivent ; b) un contexte énonciatif.
Si on accepte de définir le texte comme une suite d'énoncés (éventuellement réductible à un seul), la grammaire de texte, elle-même définissable comme l'ensemble des règles permettant l'interprétation (ou, plus exactement, la prévision d'interprétation) des textes, devra s'assigner — au minimum — deux objectifs: a) fixer les règles d'interprétation liée au contexte linguistique, indépendamment de tout engagement énonciatif (composante locutoire du texte); b) fixer les règles d'interprétation liée au contexte énonciatif (composante illocutoire du texte). Indépendamment — redisons-le — de toute situation énonciative, tout élément d'un texte, et par conséquent tout texte, doit obéir à une règle majeure : la cohésion textuelle (ou continuité thématique). Cette règle exige que toute séquence textuelle s'insère de manière satisfaisante dans son contexte linguistique. Le non-respect d'une telle règle expose à ce qu'on nomme communément le coq-à-l'âne. Ainsi, si un professeur de linguistique, au milieu d'un cours, déclare d'un seul coup : Aujourd'hui est un très grand jour : le Beaujolais nouveau est arrivé,cette séquence textuelle, en elle-même pleinement interprétable, sera contextuellement inacceptable.