La tertiarisation de l’emploi va de pair avecune autre évolution de fond : la réduction de la taille desétablissements où travaillent les salariés. En 1976, 17 %d’entre eux travaillaient dans des unités de plus 500 personnes ; en2001, ils n’étaient plus que 11 % à être dans ce cas. Acontrario, ceux qui travaillent dans des établissements de moins de dixsalariés sont passés, dans le même temps, de 15,5 % dutotal à 24,4 %. Il faut se garder cependant d’en conclure trop viteà la montée en puissance dans l’emploi des PME par rapport auxgrands groupes : il s’agit ici d’établissements et non d’entreprises. Lapériode récente a été en effetmarquée par un double processus : d’une part, un mouvement dedécentralisation des grandes entreprises, qui ont cassé leursconcentrations de salariés pour les rassembler dans des unitésplus petites, à taille plus humaine, et d’autre part, le regroupementdes PME au sein de groupes (ou de réseaux de franchisés, dans lecommerce en particulier).
La tertiarisation s’est en effetaccompagnée d’une industrialisation des activités de services.Une évolution perceptible, par exemple, dans un restaurant McDonald’s,qui ressemble en fait à une petite usine à fabriquer deshamburgers.
L'anticipation est capitale pour nosentreprises. Elle est d'autant plus nécessaire qu'elles ne pensent pasencore naturellement à ces nouveaux marchés alors que nos voisinsallemands y sont traditionnellement présents avec des exportationsquatre fois supérieures. Les entreprises allemandes seront lespremières bénéficiaires de cette ouverture. A nous deprouver que nous pouvons compter parmi les premiers partenaires des nouveauxmembres. Ce sont en effet des marchés de proximitéoù la France dispose d'une marge de progression commerciale de plusieurspoints.
Rien d'étonnant que certains appellent– et François Fillon, ministre des affaires sociales l'a fait pour laFrance – à la mise en place d'un "plan de convergence social"entre les Etats membres et les nouveaux arrivants. Avec en ligne de mire lesconditions de travail, afin de juguler les risques de dumping, explique-t-onofficieusement. Ce faisant, le ministre français s'est tournévers les partenaires sociaux pour les appeler à négocier dans denombreux domaines. Mine de rien, l'homme politique a peut-êtreappuyé là où le dossier social de l'élargissementsemble le plus ardu à défendre : le dialogue social.
La représentativité despartenaires sociaux des pays candidats est en effet encore trèsfaible, même si des progrès ont étéréalisés.
" Après l'ouverture du rideaude fer, les pays occidentaux redoutaient un déferlement "deréfugiés de la faim" quittant la misère pour seprécipiter vers "l'Europe de la prospérité",rappelle Anne de Tinguy, chargée de recherche CNRS au Centred'études et de recherches internationales (CERI). Une trèsimportante poussée migratoire s'est en effet produite, mais ellene s'est pas transformée en exode."
Si, dans toutesles projections, les craintes d'un afflux massif paraissent non fondées,des inconnues demeurent néanmoins. Les chiffres pourraient en effetévoluer en fonction de la date d'entrée en vigueur de la libre circulationet de la situation économique et sociale des pays candidats et de ceuxde l'Union.
Y aura-t-il suffisamment d'interprètessur le marché pour que les Européens puissent se comprendre,après l'élargissement? Cette question inquiète lesdirecteurs des ressources humaines des différentes institutionscommunautaires. Avec l'arrivée de dix pays, l'Europe va en effetdevenir une véritable tour de Babel.
L'intégration des pays du sud del'Europe avait ainsi été critiquée dans le passé ;celle des nouveaux pays ne risque-t-elle pas d'accroître encore ceproblème ? Leur niveau en matière de recherche et d'innovationest en effet globalement très inférieur à lamoyenne de l'UE.
Certes, …mais
Pas de chichis non plus dans les hôtelsFormule 1. Les chambres – pour trois – ne mesurent que 9 mètrescarrés. En dehors des plages horaires où la réception estassurée, c’est un distributeur automatique qui prend le relais. Quantaux toilettes et aux douches, elles sont communes à plusieurs chambres.C’est certes moins pratique pour le client, mais cela limitel’investissement et les frais d’entretien.
Silvio Berlusconi n’a fait que dire tout hautce que la plupart des libéraux pensent tout bas : ce n’est pas l’emploiqui manque, mais la volonté d’en chercher. La société n’apas à se préoccuper du sort des gens puisque ce sort, il ne tientqu’à eux de l’améliorer. Certes, l’incitation àtravailler au noir était malheureuse. Elle est cependant secondairedans l’affaire : les opportunités ne manquent pas, déclare en substanceIl Cavaliere, il suffit de se débrouiller. Les pauvres et lessans-emploi n’ont qu’à s’en prendre à eux-mêmes s’ilsrechignent à le faire.
Dans uneéconomie de marché, un gouvernement peut être conduità prendre parfois des mesures favorables aux entreprises, voireà certaines catégories sociales, quand c’est la conditionindispensable d’une relance de la croissance, et donc de l’emploi. Mais lemoment est-il venu de mener une politique favorable à l’offre et surtoutaux hauts revenus ? On peut en douter. Certes, c’est l’investissementqui est aujourd’hui le plus malade. Mais est-ce en menaçant defermer le robinet de la consommation qu’on parviendra à le relancer ?Assurément non.
Certes, l’échec du communisme n’interdit en rien une critique radicalede la domination politique des intérêts du capital, dans le cadrede l’économie de marché et de la démocratie. Maison bute alors sur un second obstacle. Les démocraties fonctionnent enréalité comme des oligarchies : une éliteéconomique et technocratique y maîtrise de fait l’ensemble deschoix publics. Dès lors, les électeurs peuvent provoquerl’alternance des gouvernements, mais pas celle des politiques, tant que lamajorité au pouvoir dans les grands partis n’y trouve pas sonintérêt. Dans les années 80, la droite libéraledomine la plupart des gouvernements occidentaux.
Les Quinze n'ont même pas daignédonner à Ankara quelque espoir d'être un jour admissible àl'UE en lui fixant une échéance, même lointaine. Leursilence fait office de réponse aux demandesréitérées d'un partenaire qui ne cesse de manifester sonsouhait de les rejoindre.
Certes, la Turquiedoit encore fournir d'énormes efforts pour devenir concrètementéligible à l'intégration… Mais, si ce pays avance trop lentementen matière de respect des libertés élémentaires, ilavance tout de même.
Pour certains, c'est une questionde logique, de bon sens. Les pays candidats, quoi qu'en dise la Commission ou,au contraire, comme le laisse entendre la Commission, ne sont pas prêts.Les pays membres ne sont pas prêts non plus, les réformes bancalesqu'ils ont décidées à Nice n'ont pas résolu, maisaggravé les questions institutionnelles… L'argumentairede ceux qui voudraient que les Irlandais arrêtent la machine infernale del'élargissement le temps que tout le monde se prépare est certesplus élaboré. Mais est-il moins hypocrite ? Les nouveauxcandidats, nous explique-t-on d'abord, sont trop nombreux, trop pauvres, et pasassez préparés. Certes. Mais qui a décidé derésoudre le problème en une seule et large premièrefournée de dix candidats ? Peut-être était-ce une erreur,peut-être pas, mais il serait élégant, de la part desQuinze, de l'assumer.
De la même manière, au momentoù l'attitude américaine rend plus urgent que jamais un fortcontrepoids, est-il vraiment judicieux d'attiser, à Varsovie commeà Budapest et dans les capitales baltes, les braises du douteeuropéen et de la tentation américaine ? Après tout, c'estbien Washington qui a ouvert, dès 1999, les portes de l'OTAN, ets'apprête à les rouvrir. Certes, le "geste" n'estpas vraiment comparable, mais est-ce vraiment le moment de conforter levieux stéréotype d'une Europe de l'Ouest égoïste etpeu fiable ?
Les données concernant lapauvreté, présentées entre autres dans le dossier spécial(décembre 2002) de la Revue élargissement éditéepar la Direction des relations économiques extérieures (DREE), neprêtent pas non plus à sourire : la Hongrie comptait 15 % depauvres en 2000, et la Roumanie, qui sera, certes, de la deuxièmevague de l'élargissement, détient un triste record, avec 45 %.
Elie Cohen, directeur de recherche au CNRS,autre virulent détracteur, dans le passé, de la recherchecommunautaire, fait lui aussi confiance à Philippe Busquin pour ne pasrenouveler les erreurs du passé : "Le décrochagevis-à-vis des Etats-Unis commence à devenir un sujet politique. Certes,il y aura des pressions fortes des pays pour que chacun ait son laboratoire derecherche. Et y céder serait l'horreur absolue. Mais PhilippeBusquin et ses pôles d'excellence donnent des raisons d'espérer.En outre, des systèmes innovants se sont déjà mis enplace, en liaison avec les pays du nord de l'Europe. Les pays baltes sont lacour arrière de ces pays et en bénéficientdéjà."
A partir du 1er juillet 2003, Ukrainiens,Biélorusses et Russes devront avoir un visa pour aller en Pologne etdans les pays baltes. Le vice-ministre des affaires étrangèress'est élevé contre "la limitation de fait de laliberté de circulation" et "l'apparition de nouvelleslignes de démarcation en Europe". Au pays du présidentLoukachenko, la liberté est certes un concept àgéométrie variable. Mais il sera plus compliquéd'aller à l'Ouest surtout lorsque les nouveaux membres de l'UEintégreront l'espace Schengen. Il en ira de même pour les Russesqui se rendront dans les anciens pays frères.
Si(=quoique)
La première insécuritéest bien celle de l’emploi, vécue directement par trois millions et demide chômeurs (2), et indirectement par leurs familles ou leurs proches : sil’on a beaucoup évoqué la délinquance, lapremière raison citée comme explication du vote de 2002(enquête du Centre d’étude de la vie politique française,le Cevipof) reste le chômage (évoquée par 61 % dessondés, contre 57 % pour la délinquance).
La réforme de 1975, qui introduit ledivorce par consentement mutuel, a permis à des millions de couples demettre fin (souvent à l’initiative des femmes) à une union qui serévélait être un échec. Mais, si les femmesvivent mieux seules que dans un couple désuni, il leur faut gérerles conséquences des ruptures, notamment les difficultésréelles qu’entraînent ces séparations.
Si une partie del’opinion s’inquiète, non sans raison, d’une insécuritémontante dans les domaines de l’emploi, de la famille ou de la ville, elle estloin d’aspirer à un retour en arrière. Le travail des femmes, ledivorce et les recompositions familiales, l’avortement et la contraception sontdésormais très majoritairement acceptés.
Les auteurs de l'étude proposent deuxscénarios en cas de réforme ou non de la PAC. Si le budgetde la PAC ne varie pas, la baisse de la subvention versée àl'agriculture française entraînerait une forte diminution demain-d'œuvre qualifiée et non qualifiée : "respectivementde 6 % et 10 % en 2003, 9 % et 13 % en 2010".
Si SilvioBerlusconi ne passe pas inaperçu, il n'est plus une exception dans lePPE, qui s'est peu à peu éloigné de ses racinesdémocrates-chrétiennes pour englober la grande majoritédes partis du centre et de droite de l'Union européenne.
Si les mots"Constitution européenne" ne sont plus tabous, ils sonttrès souvent utilisés dans un sens qui ne correspond pas àcelui construit par les juristes. En témoigne la confusionrégulièrement entretenue dans les discours entre traité etConstitution, confusion qui débouche parfois dans la formule"traité constitutionnel".
Les exportations des PECO vers l'Europeoccidentale ont progressé de 15 % par an en moyenne, dans lesannées 1990. Mais ce développement est resté dans unelarge mesure asymétrique : si l'UE représente 70 % deséchanges des pays de l'Est, ils ne forment en retour que 4 % desexportations de l'Ouest. Plussignificatif encore, si la population des dix pays candidats correspondà 20 % de celle des Quinze, ils ne constituent que 4 % du produit intérieurbrut (PIB) de l'UE en euros courants.
Pour que la machine ne se grippe pas, ilfaudra évidemment l'aider, et faire preuve de solidarité. Commeavec l'Espagne, le Portugal et la Grèce, principauxbénéficiaires des fonds structurels. Les dix pays quiintégreront l'Union en mai 2004 le seront également. Cesfinancements, selon Emmanuel Julien, chargé au Medef des affaireseuropéennes et internationales, "devraient servir de catalyseursaux changements à mener"... comme ce fut le cas pour les paysdu Sud.
Car si l'optimisme sembleprévaloir, les experts s'accordent pour dire que les dix candidats ontquelques années difficiles devant eux.
En dépit du précédent de1995, le gouvernement Raffarin n’hésite pas à tenter le passageen force de ses réformes, sans réelle négociation,manifestant en cela la nouvelle croyance dominante à droite : il n’y aplus de politique alternative crédible et, par conséquent, plusde réel débouché politique à d’éventuelsmouvements sociaux. Et l’attitude des vaincus du 21 avril risque de confortercette analyse.
En effet, si le gouvernement Raffarin se distingue clairement dugouvernement Jospin par son souci de démanteler les réformessociales de la gauche, il apparaît à d’autres égards dansla continuité d’une conversion libérale qui a égalementtouché les socialistes, en France comme partout en Europe.